Appel à contribution d’articles – Cahiers des Amériques latines

Le Cahiers des Amériques latines lance un Appel à contribution d’articles autour du thème :  Cuba : les temporalités et tensions du changement. Le dossier coordonné par Blandine Destremau (IRIS/CNRS), Nils Graber (Cermes3/EHESS) et Jérôme Leleu (CEMI/EHESS)

Date limite des propositions d’articles : 2 mai 2016.

Date limite de réception des articles : 20 juillet 2016.

Publication prévue en mars 2017.

Cuba traverse une intense période de changements, impulsés par les réformes lancées pour sortir le pays de la crise économique qui le touche depuis les années 1990 et renforcés depuis la présidence de Raul Castro en 2008. Les transformations des relations internationales de Cuba produisent un effet d’accélération de ces changements : processus de « normalisation » des échanges avec les Etats-Unis et l’Union européenne, renforcement de son intégration régionale et de ses rôles diplomatiques, ouvertures à des institutions religieuses et à des ONG.

Les changements que traverse Cuba touchent la plupart des cadres institutionnels et économiques. Il affecte les structures productives, les façons de consommer, les expériences et stratégies individuelles, les mobilités et les communications, les formes de propriété et de transmission du patrimoine, les solidarités, les statuts des travailleurs, les carrières professionnelles, etc. Certains secteurs d’activité se consolident – tourisme, services médicaux et des biotechnologies, activités privées marchandes –, d’autres voient leur poids diminuer – perte de vitesse de l’industrie du sucre, réduction et dévalorisation de certains emplois publics –, engendrant des déplacements dans la structure sociale et des inégalités. Pour autant, ces modifications procèdent de tâtonnements et d’expérimentations, s’intègrent dans un affichage constant du projet socialiste, et composent avec des inerties et des résistances.

Elles font l’objet de multiples analyses, débats et conjectures, émanant de chercheurs et d’universitaires, d’institutionnels, de journalistes et de particuliers. Les positions qui s’expriment sont fréquemment dichotomiques, opposant des postures transitologiques, qui présument de l’issue inéluctable du processus – l’instauration d’une économie sociale de marché (dans ses variantes chinoises ou vietnamiennes) – à des visions plus réformistes – la nécessité d’« actualiser » le socialisme cubain pour en viabiliser la reproduction, et en préserver les cadres et les acquis sociaux.

Par ailleurs, un nombre non négligeable de travaux de recherche sont menés avec un souci de faire parler le terrain, de rendre justice aux acteurs peu visibles, de lire ce qui se joue dans les espaces économiques, sociaux et politiques du quotidien, des familles, des centres de travail, des entreprises, des associations et autres lieux privés ou publics. Ils examinent les modes de prise de décision, le fonctionnement des institutions, la construction de projets économiques, culturels, d’éducation populaire, de recherche scientifique, de santé publique, etc. Ils tentent d’appréhender la façon dont ces espaces et processus sont touchés de différentes manières par les réformes politico-économiques et dont ils contribuent à les inscrire dans l’espace social et économique. Ils mettent au jour des décalages de temporalités, des tensions et contradictions, des insatisfactions.

 

PROJET DE DOSSIER

Nous proposons de publier dans les Cahiers des Amériques latines un dossier qui permettra de réfléchir à la nature des changements que traverse Cuba, à leurs dynamiques et leurs effets. Nous faisons appel à des articles de recherche en sciences sociales qui, par la diversité de leurs objets, points de vue et postures méthodologiques, permettront d’alimenter une réflexion au-delà des visions transitologiques et téléologiques, pour prendre au sérieux les formes et dynamiques de changement, tout en en analysant les apories, contradictions et risques.

Trois perspectives d’analyse du changement nous semblent devoir être articulées.

En premier lieu, l’analyse de sa dynamique et de ses conditions de réalisation: comment s’articulent transformations des relations internationales et réformes internes ? Comment s’établissent les priorités dans le cadre de contraintes budgétaires ? Comment les différents acteurs se transforment-ils et s’adaptent-ils ?

En second lieu, il nous semble important de prêter attention aux temporalités des changements, à leurs décalages, leurs synchronies, leur relation au passé. A quelles échelles temporelles appréhender le changement à Cuba ? Comment interpréter les décalages de rythme de changement, en termes de résistance, d’inertie, de résilience, de résurgence? Qu’est-ce qui fait événement ou basculement dans ces processus, et comment ?

Finalement, ces changements engendrent des tensions et contradictions : rapports de force entre acteurs inter et transnationaux et les instances du pouvoir cubain ; entre cadres institutionnels centralisés, pouvoirs locaux et capacités d’agir des individus ; entre attentes et possibilités de divers acteurs; entre demande et offre de biens et services ; entre groupes d’intérêt locaux et internationaux – dont les diasporas cubaines –, entre générations, etc.

Ces tensions et contradictions sont porteuses de dynamiques et d’innovations, mais aussi de stratégies de contournement, de frustrations, de logiques clientélistes ou d’exit, et de nouvelles hiérarchies.

Les contributions à ce dossier pourront analyser les dynamiques, temporalités et tensions des processus de changements à Cuba en fonction des différentes échelles évoquées qui pourront être articulées :

(1) Au plan des relations avec des acteurs et entités inter et transnationales, les propositions d’article pourront par exemple porter sur l’analyse des politiques internationales de Cuba qui se construisent localement à travers des acteurs et institutions spécifiques, qu’il s’agisse de négociations politiques, d’accords commerciaux, de collaborations scientifiques et médicales, de programmes humanitaires et de l’aide au développement, d’échanges culturels. Quelle est la place des organisations régionales et internationales dans ces échanges? Comment contribuent-elles à produire, accompagner et aménager les changements qui surviennent à Cuba ?

(2) Au plan des réformes politico-économiques, juridiques et sociales, et de leurs effets, nous faisons appel à des analyses interrogeant les dynamiques, temporalités et tensions dans l’élaboration et la mise en œuvre des réformes: comment les orientations du Parti se traduisent-elles par la transformation des cadres juridiques et des procédures et quels effets ont ces réformes sur les pratiques de l’entrepreneuriat, du travail, des solidarités, des problèmes de la vie quotidienne ?

(3) Au plan microéconomique et microsocial, quelles sont les stratégies et les capacités d’agir des acteurs et actrices face aux nouveaux dispositifs et possibilités de leur environnement, mais aussi par rapport aux contraintes et inerties, aux décalages et contradictions qui caractérisent le processus de changement : comment s’adaptent-ils/elles, s’intègrent-ils/elles, s’approprient-ils/elles les espaces et possibilités, contournent-ils/elles les blocages et incertitudes ? Comment expriment-ils/elles leurs expériences, aspirations et frustrations, quelles formes de contestation, de résistance, peut-on y lire ? Comment analyser les inégalités de positions et de trajectoires entre différents acteurs?

Modalités de soumission

Les propositions d’articles, rédigées en français, espagnol, anglais ou portugais, devront contenir les informations suivantes :

  • nom, prénom ;
  • université ou laboratoire de rattachement ;
  • court CV avec adresse e-mail ;
  • titre envisagé de l’article ;
  • résumé de 1 500 signes maximum précisant le contenu du projet d’article

La date limite impérative de soumission des propositions d’articles est fixée au 2 mai 2016 à l’adresse suivante : conf.cubaparis2015@gmail.com

Le comité de rédaction de Cahiers des Amériques latines informera de l’acceptation ou non des propositions dans un délai de deux semaines.

Les articles de 45 000 signes environ (espaces, notes, bibliographie, résumés et mots-clés compris) devront être envoyés aux coordinateurs pour le 20 juillet 2016. Ils seront soumis à une double évaluation anonyme.

La publication du dossier est prévue pour mars 2017.

Pour plus d’informations sur les instructions aux auteur-e-s et la forme souhaitée de l’article final, cf. « Instructions aux auteur-e-s » sur le site des CAL : http://cal.revues.org/2324